Limiter l’utilisation des produits phytosanitaires en Europe : Produits de Biocontrôle
Le 23 mars 2017, Joël Labbé et plusieurs de ses collègues ont déposé une proposition de résolution au Sénat visant à limiter l’utilisation des produits phytosanitaires au sein de l’Union européenne. Leurs souhaits : que l’Union européenne interdise à la fois l’utilisation des produits phytosanitaires par les personnes publiques, exceptions faites pour quelques domaines particuliers, et la vente aux particuliers qui, faute de connaitre réellement les dangers auxquels ils s’exposent, procèdent souvent à un surdosage.
Avec la loi n°2014-110 du 6 février 2014 visant à mieux encadrer l’utilisation des produits phytosanitaires sur le territoire national, l’application de ce type de produits est censée diminuer de façon progressive. En outre, depuis le 1er janvier 2017, les personnes publiques ne peuvent plus utiliser certains produits phytopharmaceutiques pour l’entretien des espaces verts, des forêts et de la voirie. Au 1er janvier 2019, la vente des produits phytosanitaires sera interdite pour les particuliers.
Pour les sénateurs, l’enjeu est triple. Il est tout d’abord sanitaire, « car les dangers dermatologiques et respiratoires d’une exposition aiguë à ces produits sont aujourd’hui connus ». Il est ensuite environnemental, car « ces produits participent dans des dimensions non négligeables à la contamination des eaux ». Or, comme le note l’auteur de façon pertinente, l’eau ne connaît pas de frontières. C’est pourquoi ces problématiques sont « transnationales et communes à l’ensemble des pays ayant recours aux produits phytosanitaires ». Enfin, l’enjeu est également économique, « puisque les services écosystémiques rendus par la biodiversité sont considérables ».
Ainsi, les auteurs souhaitent profiter de la « dynamique de protection de l’environnement générée par la COP 21 » et étendre cette initiative française à l’ensemble de l’Union européenne. À ce titre, ils demandent à l’Union européenne d’étudier dans quelle mesure la législation européenne pourrait interdire d’une part l’utilisation des produits phytosanitaires par les personnes publiques, à l’exception des stades et des cimetières, ainsi que des voiries pour lesquels un non recours à ces produits pourrait s’avérer dangereux, et d’autre part, la vente aux particuliers des produits phytosanitaires.
Ils précisent également que ces interdictions ne s’appliqueraient pas aux produits utilisables en agriculture biologique, aux produits de biocontrôle (NS de la DGAL du 28 03 2017 Liste actualisée des produits de biocontrôle homologués), aux préparations naturelles peu préoccupantes, aux usages professionnels et agricoles, ainsi qu’aux traitements et mesures nécessaires à la destruction et à la prévention de la propagation des organismes nuisibles.
Bilan de la consommation des pesticides en France
À quelques semaines d’intervalle, les ministres de l’Agriculture et de l’Environnement communiquaient sur l’évolution des consommations de pesticides. Et chacun pouvait, à son niveau, se féliciter de la baisse enregistrée en 2016. Stéphane Le Foll annonçait une diminution de 2,7 % des consommations agricoles de phytosanitaires, une première du genre, mais ne cachait pas que, lissé sur trois ans pour tenir compte des variations saisonnières, l’indicateur est toujours orienté à la hausse, avec + 4,2 %. Un chiffre qui compromet une fois de plus les objectifs du plan Ecophyto de réduire globalement les usages de pesticides de 25 % en 2020, et de 50 % en 2025. Mais le salut viendra peut-être des collectivités et des établissements publics…
Alors que le zéro pesticide s’impose à eux depuis le 1er janvier, la ministre de l’Environnement a pu effectivement annoncer une baisse de 14 % des consommations non agricoles. La preuve que les élus ont anticipé cette obligation qui nécessite formation des agents aux changements de pratique et information des citoyens. Mais les résistances sont bien réelles comme en témoignent les difficultés de faire évoluer la réglementation. En effet, l’arrêté de 2006 sur l’épandage des produits phytosanitaires, annulé par le Conseil d’État, a fait l’objet d’une consultation publique qui a mobilisé près de 14 000 commentaires. Et le dispositif des certificats d’économie de produits phytosanitaires (CEPP), lui aussi frappé d’annulation, a finalement été adopté avec la loi Potier sur l’accaparement des terres agricoles et le développement du biocontrôle.
Et pourtant, la réduction de l’usage des phytosanitaires est une vraie demande des consommateurs. Une enseigne de jardinerie comme Botanic les a bannis de ses rayons dès 2008. Et la grande distribution commence à s’y mettre également comme le reconnaît même Greenpeace. Les résultats de sa 3e édition Course zéro pesticide placent en tête Carrefour et Monoprix. Le premier vise le -75 % de pesticides dans les fruits et légumes de ses marques propres. Et le deuxième vient de lancer la marque Monoprix Tous cultiv’acteurs dans laquelle une trentaine de fournisseurs s’engagent à obtenir le label Bee friendly en adoptant des pratiques agricoles respectueuses des pollinisateurs et de leurs écosystèmes.