TIAC au Quick d’Avignon : le gérant jugé après la mort d’un adolescent et condamné pour homicide involontaire
L’ancien gérant du fast-food situé dans une zone commerciale à Avignon (Vaucluse), Philippe Quérard, a comparu devant le tribunal correctionnel pour «homicide involontaire par la violation manifestement délibérée d’obligations particulières de sécurité».
L’ancien gérant d’un restaurant Quick d’Avignon a été condamné à deux ans de prison avec sursis pour homicide involontaire, après la mort en 2011 d’un adolescent qui avait dîné dans son fast-food. Le tribunal correctionnel d’Avignon a également condamné à une amende de 50.000 euros la société qui gérait le restaurant, dans lequel de nombreux manquements à l’hygiène avaient été relevés.
L’ancien gérant, Philippe Quérard, absent au délibéré, devra en outre verser 98.000 euros de dommages et intérêts à la famille de la victime, Benjamin Orset.
Le 22 janvier 2011, à midi, Benjamin, âgé de 14 ans, était mort brutalement à leur domicile, à Oppède (Vaucluse), après s’être levé la nuit pour vomir, et s’être plaint de nausées et de maux de tête. La veille, la famille avait dîné au Quick Cap Sud d’Avignon, dans une zone commerciale, avant d’aller au cinéma. L’autopsie du jeune homme avait conclu à une « toxi-infection alimentaire », provoquée par un staphylocoque doré.
Des contrôles réalisés dans l’établissement le jour du décès de l’adolescent avaient révélé 14 non-conformités, dont cinq majeures.
L’ancien gérant d’un fast-food d’Avignon est jugé après la mort, en 2011, d’un adolescent victime d’une toxi-infection alimentaire.
«Pour les parents de Benjamin, ce procès est l’aboutissement d’un combat acharné pour que la mort de leur enfant vienne devant la justice», résume Me Marc Geiger. Avec Me Christian Bonnenfant, il défend les époux Orset, qui ont perdu leur fils âgé de 14 ans le 22/01/2011 après un banal repas au Quick.
La veille du drame, la famille, qui habite à Oppède (Vaucluse), dîne au restaurant avant d’aller au cinéma. Pendant la nuit, l’adolescent est pris de vomissements et se plaint au réveil de maux de tête et de diarrhée. Son père, qui a quasiment mangé le même menu que lui, est nauséeux. Dans la matinée, Benjamin s’écroule et décède malgré les tentatives de réanimation de son frère aîné, puis des pompiers. L’autopsie et des analyses complémentaires ont établi que le garçon a succombé à la combinaison d’une toxi-infection alimentaire, due à un staphylocoque doré retrouvé dans son organisme, et d’une pathologie cardiaque dont il souffrait.
Conditions sanitaires déplorables
Des prélèvements sont réalisés au domicile familial, dans le restaurant Quick et sur l’effectif en poste le jour du repas. Quatorze non-conformités sont relevées dans l’établissement, dont le manque d’hygiène, le mauvais état d’un des congélateurs où étaient stockés les steaks hachés et l’absence de lave-mains en fonction en cuisine. Par ailleurs, cinq des huit salariés sont porteurs d’un staphylocoque doré et le suivi médical du personnel n’est pas réalisé. Un client du même fast-food signale avoir été victime d’une intoxication alimentaire au moment des faits.
Commence alors une bataille judiciaire qui va durer cinq ans pour déterminer si la mort de Benjamin est liée à son dîner de la veille au Quick. «On n’a certes pas retrouvé la souche du staphylocoque dans le restaurant, dont les conditions sanitaires étaient déplorables, mais les prélèvements ont été réalisés plusieurs jours après le passage de la famille Orset, explique Me Geiger. Toute autre piste de contamination a été écartée.»
Mis en examen en février 2011, Philippe Quérard est placé sous statut de témoin assisté avant de bénéficier d’un non-lieu en 2014. Mais la chambre de l’instruction, saisie par les parents du garçon, le renvoie finalement devant le tribunal correctionnel en septembre 2016, estimant que «le lien de connexité entre le décès et le repas pris quelques heures auparavant dans des conditions propres à le provoquer en raison du non-respect des règles d’hygiène ne saurait être raisonnablement écarté».
Pour Me Geiger, le groupe Quick manque toutefois à l’appel. «Il appartient à l’enseigne de veiller à ce que son cahier des charges soit respecté et de prendre des mesures si ce n’est pas le cas, souligne-t-il. J’aurais trouvé normal que Quick réponde à certaines questions»
«Ce procès n’aurait jamais dû avoir lieu»
Me Philippe Van der Meulen, l’avocat du gérant décrit un homme brisé
Mon client est un homme brisé, socialement mort, dénonce Me Philippe Van der Meulen, l’avocat de Philippe Quérard, l’ancien gérant du Quick mis en cause. Il n’a plus de domicile, sa maison a été saisie.» En 2011, il avait trois restaurants de la même enseigne à Avignon et à sa périphérie, avec une centaine de salariés, mais la chaîne de fast-food lui a rapidement retiré sa franchise à la suite des faits après lui avoir accordé sa confiance pendant quatorze ans.
Le sexagénaire, qui conteste toute responsabilité, est aujourd’hui endetté. «Ce procès n’aurait jamais dû avoir lieu, poursuit le conseil. Juridiquement, le lien de causalité, unique et exclusif, n’est pas justifié. Mon client peut-il donner des explications sur la mort de Benjamin s’il n’en est pas à l’origine ? Il n’est pas facile de s’entendre dire que son enfant est malade, on préfère la thèse de l’intoxication alimentaire.»